Horaires Décalés : Attention, ça va signer ! (mis à jour le 21/07/2017)

vendredi 21 juillet 2017
par  Baldrick, Un syndiqué

Vous trouverez en pièce jointe de cet article la version finale de l’accord sur le travail en Horaires Décalés proposé à la signature des Syndicats par la Direction. Plusieurs organisations syndicales représentatives chez CGI, toujours les mêmes, semblent être très proches de la signature. Le vote interne aux adhérents CFDT et CFTC est d’un suspense insoutenable pour la CGT. Les stylos chauffent, et ça va signer !!

Pourquoi la CGT n’est pas favorable, par principe, a l’organisation du travail habituel de nuit chez CGI ?

Les employeurs ne peuvent pas contraindre leurs salariés à travailler pendant des horaires de nuit sans motif. Le Code du travail (article L3122-1) mentionne ainsi :

Le recours au travail de nuit est exceptionnel. Il prend en compte les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et est justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale.

Le travail de nuit réduit l’espérance de vie des travailleurs qui le subissent et est officiellement classifié dans la catégorie 2A des cancérogènes probables pour l’Homme par le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer), rien de moins ! Comment prendre ce sujet à la légère ?
Et nous vous listons en plus quelques autres risques connus et graves liés au travail de nuit comme :

  • les troubles neuropsychologiques
  • les troubles du sommeil
  • les troubles de la vigilance
  • les risques accrus d’accidents du travail
  • les troubles cardio-vasculaires
  • les risques de troubles digestifs
  • les troubles de la grossesse (fausses-couches, accouchements prématurés, retards de croissance du fœtus...)
  • etc. (la liste étant malheureusement non exhaustive…)

Or, la Direction n’apporte aucune justification à la nécessité de recourir au travail de nuit et fait l’impasse sur ses obligations légales. Elle ne fait que tenter de justifier de son besoin économique et opérationnel. Mais même cela, elle le fait de manière très nonchalante. Elle affirme de manière totalement péremptoire :

La capacité de CGI France de recourir au travail en horaires décalés qu’ils soient ou non organisés en travail posté est déterminante pour son développement.

Pourtant, à aucun moment elle ne peut présenter, même approximativement, le chiffre d’affaire espéré ou l’impact sur l’emploi (positif ou négatif) de la mise en œuvre ou non de cet accord. Signez, jetez vous dans le vide, et nous verrons bien si c’était vraiment nécessaire. Voilà la philosophie. C’est inacceptable pour nous, et même probablement illégal au vu du Code du Travail et des jurisprudences actuelles en la matière. Cela ne semble pourtant pas poser de problème à tout le monde !

Pourquoi la CGT-CGI ne signera pas l’accord de la Direction en l’état ?

Au-delà de la nécessaire justification du recours au travail en horaire décalés, la CGT relève de nombreux points bloquants qui n’ont pas été levés dans l’accord proposé par la Direction :

  • Les compensations sont inacceptables
    Les compensations financières vont entre 2,50€ et 6,00€ brut/heure
    Travailler de nuit est compensé au mieux au même niveau que le Dépassement de Temps de Trajet. Travailler de nuit ou être assis dans un TGV pour se rendre en clientèle représente la même gène ? Évidement non !
    Nous pourrions présenter les écarts très conséquents entre les indemnisations proposées ici et celles qui régissaient l’ancien accord dénoncé par la Direction et qui pourtant ne comprenait pas d’horaires de nuit, des dimanches et des jours fériés. Cela mettrait en évidence le niveau d’humiliation que représenterait la capitulation syndicale demandée par la Direction.
  • Des engagements qui n’engagent personne
    L’accord prévoit un certain nombre de références servant à rassurer les éventuels signataires mais qui n’engagent en rien la Direction.
    Exemples :
    Cependant, l’organisation du travail en horaires décalés qu’ils soient ou non organisés en travail posté n’a pas vocation à se généraliser au sein de l’entreprise.
    Le recours au travail sur 6 jours / 7jours n’est pas généralisé au sein de CGI France, mais peut être nécessaire à la réalisation de prestations contractuelles clients, qui ne peuvent être réalisées sans ce type d’organisations.
    Et sinon ? Et sinon rien ! Pouvez vous donner la définition de « généralisé » ? Encore un porte que les syndicats laisseraient très largement ouverte.
  • Les travailleurs en Forfait Jour sont exclus des compensations et lésés par l’accord.
    Si la CGT veut bien comprendre qu’un salarié autonome n’est pas, par définition, intégré à un planning fixé à l’avance, on ne peut pas exclure les travailleurs en forfait jour. En effet, si le salarié est affecté au management d’un projet en horaires décalés, sa tâche de travail et ses horaires en seront nécessairement impactés. L’indemnisation doit être automatique pour tous les salariés soumis aux contraintes, éventuellement de manière forfaitaire si on ne peut définir la quantité de temps en horaires décalés.
  • Fin implicite de la souplesse pour les horaire du matin et du soir à l’initiative des salarié-e-s
    La souplesse d’arrivée entre 8h et 9h et de départ entre 17h45 et 19h est à l’initiative exclusive des salarié-e-s. Cet accord, dans la philosophie, dit exactement le contraire et refuse de compenser l’absence de souplesse entre 8h et 19h. Zéro euro de compensation et c’est l’employeur qui fixe les horaires d’arrivée dans un planning !
  • Les travailleurs en cours de période d’essai sont éligibles malgré leur volontariat biaisé
    Qui est dupe ? Il est déjà difficile pour certains salariés de faire valoir leurs droits en temps normal, il est bien impossible de s’assurer du volontariat durant la période d’essai ! Nous ne souhaitons pas exposer les nouveaux entrants à des conditions de travail difficiles en plus de la précarité liée à la période d’essai. Nous ne semblions pas les seuls a avoir porté cette disposition évidente. CGI dispose de suffisamment de missions de jour et en semaine pour évaluer l’adéquation entre un salarié et son poste. A moins que la Direction souhaite embaucher des salariés avec des compétences nocturnes inexistantes de jour… mais lesquelles ? Ce débat n’a jamais pu avoir lieu.
  • Des weekends coupés en deux jours séparés
    L’accord prévoit la possibilité, même exceptionnelle (définir exceptionnel), que les jours de repos hebdomadaires ne soient pas consécutifs. La vie de famille et le repos vont en prendre un coup, potentiellement pour à peine quelques euros le samedi (18,5€ brut).
  • Le Dimanche n’est pas fixé comme jour de repos hebdomadaire par défaut
    Le travail du Dimanche va se banaliser chez CGI via cet accord. La CGT n’en veut pas sans que cela soit justifié avec sérieux. Comment peut-on concéder de tels acquis de manière aussi nonchalante ? Aucun débat ne s’est tenu sur la nécessité du travail du Dimanche, la volumétrie, les métiers, etc…
  • Risque plus fréquent de travailleurs isolés
    L’accord ne précise pas de moyens de prévention pour les travailleurs isolés en dehors des heures de nuit. Entre 6h et 8h et entre 19h et 21h, en journée le weekend, aucune prévention n’est envisagée. Il faut étendre la prévention à l’ensemble des créneaux de travail dans l’entreprise
  • Opacité totale du suivi de l’accord
    L’application de l’accord sera suivi par une « commission de suivi » qui serait composée uniquement de la Direction et des organisations signataires de l’accord. Autrement dit, ceux qui émettraient suffisamment de doutes sur l’accord pour refuser de le signer seront exclus de tout suivi des conséquences de l’application de l’accord ! Au vu de la situation actuelle où nous savons que la Direction applique illégalement des organisations de travail en horaires décalés, toutes les craintes sont permises si la CGT devait être exclue du suivi de l’accord.
    De plus, plus grave encore, l’accord proposé prévoit, à la demande d’une organisation syndicale, d’exclure les autres organisations syndicales de la négociation des revalorisations des montants. Cette possibilité relève de la compétence de toutes les organisations syndicales représentatives lors des NAO. Opacité absolue en petit cercle restreint.
  • Pas de clause de forclusion
    Si, pour une raison ou une autre, un accord de branche ou la Loi venaient à être plus favorables que l’accord, il devrait s’appliquer au bénéfice des salariés. Ce n’est pas garanti sans clause de forclusion explicite en cette période ou le gouvernement nous promet la fin du principe de faveur. C’est inacceptable pour la CGT !
  • Aucune saisie sérieuse des temps effectués dans un outil adapté et mis à jour (PSA Time)
    Le problème de la saisie du temps réel travaillé, avec les horaires de début et de fin de journée, ne date pas de cette négociation. Pourtant, bien que l’accord parle de la mise en place de travail en horaire décalés de nuit, l’accord ne prévoit toujours pas de mise en conformité de l’outil pour le contrôle par les délégués du personnel et par l’Inspection du Travail des temps. La Direction tient à éviter tout contrôle efficace du temps de travail afin de garder la "souplesse" les salariés... et surtout la gratuité des nombreuses heures effectuées au-delà du temps prévu !
  • Nombreux flous et interprétations possibles de l’accord au détriment des salarié-e-s
    Les intérêts des parties signataires étant tout naturellement divergeant (faut-il le rappeler), l’application des accords par les juges se fait de manière littérale. Chaque mot compte !
    Or, l’accord comporte de larges zones de flou qui permettent aux managers déviants une interprétation large voire contraire à la volonté exprimée par les parties prenantes à la négociation. Il contient des adverbes comme "principalement", "généralement", "notamment"... Malgré l’expérience malheureuse du précédent accord, systématiquement dénaturé par certains managers, une partie importante de l’amplitude d’interprétation semble à nouveau possible. Et nous savons dorénavant que l’interprétation par certains managers est bien rarement au bénéfice des salariés. Faut-il rappeler également la notion de rapport de force dans toute relation de travail ?
  • La naïveté du volontariat
    La Direction a fait l’aveu d’une application actuelle de projets en horaires décales, de nuit, des jours fériés et du weekend. Nous avons les témoignages de nombreux salariés qui nous font part également de cet état de fait. D’autres organisations syndicales ont parfois été alertées en même temps que la CGT des pressions et de l’absence totale de volontariat sur certains projets. Comment nier alors ces réalités et se contenter de cet accord pour régler les problèmes actuels ?
    Nous nous devons de rappeler ici à tous, que pour défendre les salariés, il ne suffit pas de signer des accords bâclés qui vont aggraver encore plus les conditions de travail des salariés sans garantir pour autant le rétablissement dans leurs droits des salariés actuellement lésés. La naïveté n’est pas une qualité que la CGT souhaite promouvoir. Pour défendre les salariés, il faut informer les salariés de leurs droits, les aider à le faire appliquer et dénoncer sans relâche les abus quand ils persistent malgré les alertes.
  • Une nécessaire réflexion sur l’avenir de nos métiers est balayée par cet accord
    Comment vont évoluer nos métiers ? Quels sont les métiers de demain dans notre Entreprise ? Est-il souhaitable de travailler en horaires décalés pour du développement de projet ou pour de la maintenance évolutive ? Est-ce inévitable ? Ces questions sont majeures et nécessitent des débats avec les salariés et avec les Instances Représentatives du Personnel. Ils ne peuvent pas être bâclés comme le prévoit l’accord proposé.
    Ici l’accord ouvrirait le travail en horaires décalés à tous les métiers facturables de l’Entreprise. Sans réflexion préalable, c’est ouvrir une boîte de Pandore. Nous ne pouvons pas cautionner cela.

En conclusion, la CGT a porté, porte aujourd’hui, et portera toujours les valeurs de progrès social ! Elle saura prendre toutes ses responsabilités si des Organisations Syndicales complaisantes venaient à céder devant les dangers du travail de nuit injustifié et devant l’attaque au lien social nécessaire à tout humain que représente la disparition du repos hebdomadaires partagé avec ses proches, en particulier le dimanche ! Elle saura communiquer largement dans l’entreprise auprès des salariés et à l’extérieur, par tous les moyens qu’elle estimera nécessaire, sur les dangers de cet accord et sur les responsabilités de chacun. Enfin, elle étudiera tous les moyens juridiques afin de défendre les droits des salariés qui lui font confiance.

Merci pour ceux qui auront atteint ce point dans la lecture.
La CGT-CGI


Documents joints

Accord Horaires Décalés - Version Finale

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